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#Libercourt 🇫🇷 Le récit de Fabien, père de famille lourdement handicapé après avoir été massacré sans raison par 3 "jeunes"

Violemment agressé par trois « jeunes » pour «un mauvais regard» il y a trois ans à Libercourt (Nord), Fabien Lherbier avait été laissé pour mort. Il raconte comment il a survécu.

Il se redresse, dĂ©plie sa longue silhouette puis se campe sur ses jambes. Fabien Lherbier vacille un peu, mais avance, un sourire aux lèvres, couvĂ© du regard par sa femme Cathy. « Vous allez voir comment il marche ! Â» s’exclame-t-elle, fière et ravie. Dans cette maison de briques rouges de Libercourt (Pas-de-Calais), depuis le drame d’il y a trois ans, chaque jour est un combat, chaque progrès une petite victoire, vite balayĂ©e par la difficultĂ© d’après.
« C’est long Â», souffle-t-il. « Un acharnement Â», soupire Cathie, en Ă©numĂ©rant les sĂ©ances qui rythment leur quotidien : kinĂ© et orthophoniste les lundis, mercredi et jeudi, ergothĂ©rapeute les mardis, balnĂ©o et neuropsy les vendredis et samedi… « Il a aussi perdu l’odorat, un peu de l’ouĂŻe, la vue de l’œil droit Â», prĂ©cisera-t-elle.
La vie de Fabien Lherbier, quadragénaire sportif et grutier de profession, a basculé à l’aube du 28 mai 2015. Ce jour-là, levé très tôt pour aller courir ses 10 km, ce père de trois enfants constate la disparition de ses chiens. Il prend sa voiture, part les chercher. Dans l’impasse d’une cité voisine, il tombe sur trois types d’une vingtaine d’années. Deux ont passé la nuit à boire et à fumer du shit.
Selon le troisième, le seul Ă  s’être exprimĂ© depuis leurs interpellations, « un mauvais regard Â» dĂ©clenche l’agression : un dĂ©chaĂ®nement d’ultraviolence… FrappĂ© Ă  la tĂŞte avec une bouteille, Fabien perd connaissance. Les coups pleuvent encore. L’un lui roule sur les jambes, les autres vont acheter un bidon d’essence. Puis le trio hisse le corps dans un coffre, l’embarque jusqu’à un champ Ă  10 km, le sort et le dĂ©shabille avant d’incendier sa voiture. « Je l’ai laissĂ© Ă  6 m Â», lâche l’un Ă  ses comparses.

«Trente ans de mémoire effacée, sauf celle des siens»

PolytraumatisĂ©, le corps brĂ»lĂ© sur près de 30 %, Fabien Lherbier est dĂ©couvert nu et inanimĂ© par les pompiers près de son vĂ©hicule en feu. Son pronostic vital est engagĂ©. A son Ă©veil, après de longs mois de coma et de soins intensifs, il ne se souvient plus de rien. « Trente ans de mĂ©moire effacĂ©e, sauf celle des siens Â», sourit Cathie. « On lui a lu le journal que j’avais Ă©crit pendant son coma. Pour qu’il sache comment on avait vĂ©cu nous de l’autre cĂ´tĂ©. On a pleur酠», raconte, encore très Ă©mue, sa belle-sĹ“ur Aurore.
Centre de rĂ©Ă©ducation, hĂ´pital de jour : Fabien Lherbier ne rentrera chez lui que deux ans plus tard. « Je n’arrivais plus Ă  parler, Ă  manger seul, Ă  marcher Â», articule-t-il, en peinant encore Ă  former ses mots. « C’est un miraculĂ©, soulignent ses avocats Mes LoĂŻc Bussy et Damien Legrand. Un homme ordinaire, dont la vie a basculĂ© dans l’extraordinaire du fait d’un processus criminel barbare. Le combat qu’il mène avec les siens est admirable. Â»
Jusque-là, la bataille pour que ce corps abîmé regagne de l’autonomie et pour garder soudée cette famille aimante prenait toute la place. Les tracas administratifs, expertises médicales ou procédures pour obtenir statut d’invalidité ou provision indemnitaire aussi.

« Eux sont en prison. EnfermĂ©, je le suis aussi Â»

Mais dĂ©but avril, l’organisation d’une reconstitution par le juge d’instruction lillois en charge du dossier a ramenĂ© Fabien Lherbier trois ans en arrière. « C’est moi qui ai voulu y aller. Pour savoir ce qui m’était arrivĂ©. J’en avais besoin. Je voulais les voir. Mettre un visage sur leur nom Â», explique-t-il.
Depuis, des bribes de mĂ©moire lui sont revenues : le visage de l’un des agresseurs ; la sensation d’avoir eu « de la terre dans la bouche Â». Lui assure que cette Ă©tape « (lui) a fait du bien Â». Sa femme nuance : « Il a beaucoup cogitĂ©. Il a pris conscience de ce qu’il avait perdu. Il m’a dit : Tu vois, eux sont en prison, enfermĂ©s. EnfermĂ©, je le suis aussi. » Fabien l’écoute. Il acquiesce. Son regard malicieux s’assombrit : « Ils m’ont tout pris. Je n’ai plus de libertĂ©. Â»

« Ils nient les faits, et s’en amusent presque, ils n’ont rien fait disent-ils Â»

Après ce premier face-Ă -face avec ces trois jeunes dont l’allure de « gamins Â» les a surpris, Fabien et Cathie Lherbier n’espèrent plus beaucoup du procès Ă  venir (l’instruction devrait bientĂ´t ĂŞtre close). Sinon « qu’ils prennent le maximum Â» pour la « tentative d’homicide Â» qui leur est reprochĂ©e. « Ils ne ressemblent Ă  rien. Ils se sont fichus de nous ! Â» dit leur victime avec colère, en Ă©voquant ce « bon rĂ©tablissement Â» cynique que l’un de ses agresseurs lui a lancé 
Cathie, elle, estime que cette reconstitution leur a permis de faire ce pas-lĂ  : « Cela nous a aidĂ©s Ă  comprendre qu’il n’y aura pas de pourquoi. Pas d’explications. Je l’ai vu dans leur regard : ils sont sĂ»rs d’eux, ils n’ont rien fait. Â»
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