Longtemps regardée comme le modèle social-démocrate par excellence, la Suède traverse aujourd’hui une période d’incertitude marquée par de nouveaux défis. Pour le chercheur suédois Tino Sanandaji, l’immigration massive et l’intégration de nouvelles populations doit amener ce système à se réformer.
FIGAROVOX.- Vu depuis la France, le modèle suédois est considéré comme une société idéale, et un exemple de social-démocratie. Vous affirmez au contraire que la Suède vit une période de rupture quant au consensus démocratique, en particulier sur la question de l’immigration. Pourquoi?
Tino SANANDAJI.- La Suède est en effet admirée partout dans le monde, notamment parce qu’elle a connu pendant des décennies une période de prospérité économique au cours de laquelle les salaires étaient très élevés et, surtout, relativement équitables. Toutefois, depuis quelque temps, le pays connaît une montée des inégalités qui va de pair avec une dégradation du climat social et une criminalité de plus en plus forte. Or cette criminalité est largement le fait d’une population immigrée, qui fait donc davantage l’objet de la colère des Suédois. Pour autant, le pays reste prospère et calme, mais l’âge d’or qu’il a connu se détériore lentement.
Par opposition notamment au contexte français, suite à la crise des banlieues en 2005, les Suédois ont longtemps promu un modèle ambitieux d’intégration des populations immigrées. Aujourd’hui, la Suède prend-elle finalement une pente semblable à celle de la France?
Oui, je crois. La France a précédé la Suède en matière d’insécurité et de tensions identitaires: lorsque j’étais étudiant, on nous présentait les banlieues françaises comme quelque chose d’exotique et de très éloigné de notre modèle. Mais à présent, la situation est pratiquement semblable. Dans la ville de Malmö, le taux d’homicide est encore plus élevé qu’à Marseille! De toute évidence, la France comme la Suède demeurent tous deux des pays prospères où il fait encore bon vivre, mais ce contexte de montée des tensions en zone urbaine face à des minorités de plus en plus présentes est similaire. Or nous aurions dû tirer des leçons de ce qui s’est passé en France dans les banlieues, mais à l’époque cela nous semblait inimaginable que la même situation puisse se produire chez nous.
Car si la Suède est un pays réputé libéral et tolérant, ses habitants se soumettent en réalité à de nombreuses règles de savoir-vivre qui sont durement sanctionnées par le groupe si elles ne sont pas respectées. Dans les faits, on constate que les difficultés liées à l’exclusion sociale des immigrés sont renforcées par une tolérance de façade qui ne se traduit pas par la mixité sociale mais au contraire par un renforcement de l’entre-soi. Ces phénomènes mettent en cause l’idée d’un modèle d’intégration réussie en Suède.
Lire la suite sur Le Figaro
En savoir plus sur Notre Quotidien
Subscribe to get the latest posts sent to your email.